Là. Arrivés dans les anses, criques, calas, du sud de la Sardaigne, puis à Minorque, on se prête à choisir alors les transparences, les paysages, les couleurs de « son coin de mouillage » : là, oui, c’est mieux, c’est bien là.
Choix de son rapport à la beauté pour une nuit nomade.
Un fond de sable pour l’ancre, sans trop abimer les fonds. Et puis, l’entrée en scène, très vite des masque, palmes, tuba. Départ du bateau ou de la plage proche. On lâche l’échelle ou on lâche la terre, les pieds s’envolent dans l’eau.

On franchi une frontière, invisible, pour rentrer dans un autre milieu ou tout est fait de glisse, d’effleurement liquides, de bruits ouatés et du sentiment d’être toléré, au sens premier de la tolérance : admis à être là aussi dans un monde qui n’est pas le notre.

Comme les poissons sont placides, acceptants !, craintifs pour certains de cette grande ombre soudaine qui s’étend au dessus d’eux, surement insolite si prés de la cote. Là, la lumière qui joue en continue, transparences qui s’animent, magnifient les herbiers, irradient les champs d’acétabulaires et de padines queue de paons, découvrant une étoile de mer rouge, le bleuté turquoise d’un poulpe qui se réfugie dans un trou. Là, ces tombants de roches dans le profond, d’un bleu voisin sans fond qui fait battre le cœur.

 

Mais non, vont tranquillement : girelles, girelles paons, serrans écriture, bans de saupe miroitants et peureux, sars colorés, oblades et Castagnoles curieux de cette chose flottante qui est vous. Ils passent à portée et vous suivent.
Un petit coup de masque en surface : pas de moteur en vue, replongée.
Oui il y a bien des mondes superposés. On dirait du Murakami.