L’Ecosse… 500 milles de la Bretagne, y a pas, à un moment, il faut « bouffer » du mille, et monter.

Même avec quelques escales entre, les traversées prennent le dessus sur le cabotage.

La traversée …désirée ? redoutée ? les deux bien sûr c’est ce qui rend tout meilleur.

 

Chaque traversée est un condensé d’aventures …plus ou moins grandes, plus ou moins amusantes…, et plus ou moins avouables ; assez peu définissables. Plus de Code Civil, de Code Pénal ; pour la loi ici, le credo, c’est les cartes : C-maps, visitmyharbour, les fichiers Grib, c’est-à-dire plus prosaïquement : le vent, la mer, les cotes.

La traversée commence par une perspective pas si anodine et qui me fascine toujours : on ne voit plus que la mer autour du bateau, de sorte qu’il devient l’épicentre du monde, le cœur opérationnel : tout part de lui et tout se résume à lui, à ce qui s’y passe ou à ses abords.

Bref, on est seuls, résolument seuls au milieu de la mer…ou presque.

Ça n’a pourtant rien à voir avec la solitude ou le désœuvrement, car on s’affaire à l’allure, aux changements de vents : les molles, les fraîchissements, jusqu’où ? « c’est pas ce qui était annoncé », bon, on fait avec ou …. sans !. Soit c’est plutôt calme et on s’étonne de pouvoir continuer à vivre assez normalement, lire, cuisiner, jouer, se détendre ; soit c’est… le contraire ! et tout devient le triomphe de l’effort. Quoiqu’il en soit, on veille sur l’humeur du capitaine, de l’équipage, on parle infiniment, inlassablement, voire on s’inquiète, de la moindre variation du vent et de l’état de la mer. Et alors, le temps, le fameux temps temporel de terre, se déforme, devient différent, élastique, s’allonge, s’accélère dans les manœuvres, le temps, comme sous l’effet d’une drogue, est devenu moins contingent.

 

Et puis, on reste urbain « façon mer », on reçoit s’il vous plait! fous de bassan, guillemots, puffins, adorables macareux, et surtout visites enjouées et animées de dauphins espiègles, baleines, tortues.

Dans la traversée de la Celtic sea, ( en dessous de la mer d’Irlande), des Scilly, au Pays de Galles, on a eu des heures d’escorte presqu’ininterrompue, de dauphins par bandes, hordes, venant de partout comme pour un rendez vous dans notre vague d’étrave, certaines fois les mêmes, (on les reconnait à leurs couleurs et à certaines marques sur leurs corps). Si nombreux, le soir, au petit matin, la nuit pendant le quart dans leur sillage phosphorescent et bruits d’expiration en surface. La venue des dauphins : source inépuisable et infaillible de joie.